« Les vélos et les rythmos » par l’Amicale des cyclos cardiaques
L‘Amicale des cyclos cardiaques est une association loi de 1901. Elle agit sous le double parrainage de la Fédération française de cyclotourisme qui défend une pratique du vélo non compétitive et de la Fédération française de cardiologie qui valide leur démarche et leurs valeurs.
L’équipe de rythmologie du service cardiologie CH Louis Pasteur à Chartres nous parle de la fibrillation atriale et des troubles du rythme ventriculaire d’effort.
Les rythmos
La rythmologie est le domaine de la cardiologie qui s’intéresse plus particulièrement aux troubles de rythme et de conduction intra cardiaque. Pour être plus directs, nous sommes les électriciens du cœur. Le domaine étant vaste, nous allons nous consacrer à deux sujets : la fibrillation atriale et les troubles du rythme ventriculaire d’effort.
1) La fibrillation atriale (d’après ESC guideline 2020)
La fibrillation atriale (FA) est l’arythmie cardiaque la plus fréquente, elle survient à partir de 55 ans dans un cas sur trois et son incidence sera de plus en plus croissante avec l’âge. Elle est aussi globalement croissante avec le temps et au fil des générations, devant la sédentarisation et l’hygiène de vie de nos populations (en espérant que vous ne faites pas partie de cette généralité). Fait moins connu, elle est plus présente chez l’ultra sportif (marathonien, iron man (triathlon), etc.). En quelques mots, elle est source d’un tiers des accidents vasculaires cérébraux (AVC), de 20 % d’insuffisance cardiaque, de dépression et trouble cognitif.
Mais qu’est-ce que la FA ?
Le cœur est composé de deux parties : le cœur droit qui reçoit le sang non oxygéné et l’envoie aux poumons, et le cœur gauche qui reçoit le sang oxygéné des poumons et l’envoie à la circulation générale. Chaque partie est elle-même subdivisée en deux : le ventricule et l’oreillette. Les oreillettes dictent le rythme aux ventricules et l’aident à se remplir, les ventricules une fois remplis expulsent le sang vers l’extérieur du cœur.
La fibrillation atriale est une perturbation du courant électrique de l’oreillette. Si le courant électrique dans notre cœur peut être apparenté à un fleuve calme n’allant que dans un sens, la fibrillation atriale serait la désorganisation de ce courant due à des agressions extérieures (comme des pierres envoyées dans ce cours d’eau, que sont les extra systoles) ou internes (comme un rocher perturbant le cours d’eau, qu’est la fibrose atriale).
Cette désorganisation va engendrer une contraction désorganisée de l’oreillette qui va moins bien fonctionner. Le remplissage du ventricule baisse, la fréquence cardiaque va s’accélérer et être irrégulière et le sang qui stagne peut former des caillots. La FA est donc associée à un risque accru d’Accidents Vasculaires Cérébraux.
Les symptômes générés par la maladie sont fatigue, essoufflement, baisse des capacités physiques (typiquement chez le grand sportif) ou encore palpitations. Les symptômes peuvent être ponctuels ou permanents.
Beaucoup de bruit pour pas grand-chose ! Cette maladie se traite très bien !
La première chose à discuter avec le cardiologue est l’indication ou non d’un traitement anti coagulant. Même sous anticoagulant le Vélo est possible. Les seuls interdits sont les sports dits « extrêmes » car les risques sont les traumatismes sous anti coagulants. Le traitement anti coagulant ne fait saigner que s’il existe une « raison » de saigner (des gencives malades pour les dents, une tache vasculaire pour le nez, un polype du colon pour le tube digestif, etc…)
La deuxième prise en charge est une façon d’éviter la récidive des crises. Il existe deux prises en charge. La première possibilité est médicamenteuse contrôlant jusqu’à 60% des patients. Il associe une à deux molécules dont les béta bloquants. La deuxième possibilité est un geste de cautérisation cardiaque appelé ablation. Ce geste contrôle jusqu’ à 80% sur 5 ans et permet d’éviter les traitements médicamenteux (en dehors des anticoagulants). Il présente cependant des risques opératoires tels l’AVC dans moins de 1% des cas. Le choix serait à discuter avec votre cardiologue.
2) Les troubles du rythme ventriculaire d’effort
Ce sont, à la différence des troubles du rythme qui proviennent des oreillettes des troubles du rythme potentiellement graves, notamment lorsqu’ils surviennent à l’effort, responsables de la mort subite du sportif. Comme leur nom l’indique, ils proviennent de la cavité ventriculaire, droite ou gauche en fonction de l’atteinte cardiaque. Ils sont heureusement très rares.
Nous savons que l’activité physique est associée à une diminution du risque de survenue d’accidents cardio vasculaire d’où les recommandations de la Haute autorité de aanté et de l’OMS de pratiquer idéalement 30 minutes d’activité physique par jour d’intensité modérée et quotidiennement.
Il n’y a aucune preuve pour dire que l’activité physique même intense puisse être délétère pour le cœur à l’exception de maladies rares connues. Cependant, le sport de compétition et la recherche de performance sportive favorisent ces troubles du rythme. En France, on compte environ 1300 infarctus/an pendant un effort sportif sur 140 000 infarctus au total et 1 000 morts sportifs dont 80 % sont d’origine cardiaque.
La survenue des accidents cardio vasculaire augmente avec l’âge avec un pic entre 45 et 50 ans, expliqué notamment par une diminution du nombre de compétiteurs au-delà de cet âge.
La mort subite du sportif de moins de 35-40 ans est essentiellement d’origine héréditaire familiale (36 % de cardiopathie hypertrophique c’est-à-dire un muscle cardiaque trop épais) parfois d’origine virale (myocardite) et éventuellement d’origine traumatique après un choc thoracique important (commotio cordis).
La prévention repose donc sur la réalisation d’un bilan cardio par électrocardiogramme et échographie cardiaque voire épreuve d’effort en cas d’antécédent familial de mort subite ou de maladie cardiaque héréditaire connue chez les proches (parents, oncles tantes, frères et sœurs, cousins). Un test génétique est éventuellement proposé surtout si plusieurs malades connus dans la famille. Il faut également respecter les bonnes pratiques sportives en n’allant pas s’entraîner les 10 jours suivant un épisode d’infection viral.
La mort subite du sportif de plus de 40 ans, c’est-à-dire du vétéran pour le monde sportif est essentiellement d’origine ischémique c’est-à-dire liée à une artère coronaire qui s’obstrue brutalement : c’est un infarctus. Les sportifs concernés sont évidemment ceux avec des facteurs de risque cardiovasculaire (tabagisme, hypertension artérielle, hérédité coronarienne, diabète, hypercholestérolémie) mais certes cas de figure plutôt peu fréquent chez le sportif. Le sportif concerné est plutôt l’homme de 60 ans, pratiquant la course à pied ou le cyclisme avec un niveau d’entraînement faible. Le facteur déclenchant est souvent la durée et l’intensité de l’effort (compétition type marathon avec survenue à l’arrivée, « fractionné intense » des sports amicaux) qui génèrent un stress cardiaque avec risque de rupture d’une plaque coronaire lipidique instable et obstruction de la lumière d’un vaisseau.
La prévention repose donc sur le bilan et la prise en charge de ces différents facteurs de risque cardiovasculaire (arrêt du tabac surtout 2 heures avant et 2 heures après l’effort) et réalisation d’une épreuve d’effort si présence de plus de deux facteurs de risque. Une nouvelle fois, les dix règles de bonne pratique sont à respecter : éviter l’entraînement en cas de froid ou de chaleur extrême, bien s’hydrater et surtout s’arrêter et consulter rapidement en cas de symptômes annonciateurs type douleur thoracique, essoufflement, palpitations, diminution de ses capacités à l’effort et des performances.
En conclusion
Rappelons que la capacité physique d’effort reste le meilleur marqueur actuel d’espérance de vie en bonne santé et que les deux seuls traitements préventifs validés sur les effets du vieillissement sont la diététique et l’activité physique modérée et régulière. La lutte contre la sédentarité et l’inactivité physique est primordiale car celles-ci sont pourvoyeuses de nettement plus d’accidents cardiovasculaires que l’effort physique même si celui-ci peut être un facteur déclenchant.
Pour diminuer ce risque autant que possible, une pratique raisonnable et régulière du sport en respectant les règles de bonne pratique est recommandée avec une consultation cardiologique en cas d’antécédents familiaux cardiaques ou de survenue de symptômes.
Aller plus loin
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