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Le port du casque à vélo rendu obligatoire pour tous ?

Le port du casque à vélo rendu obligatoire pour tous ?

Lu sur le site Internet du Huffington Post

Casque obligatoire à vélo et trottinette, une fausse bonne idée?

Défendu par certains députés de la majorité, le port du casque sur des engins, motorisés ou pas, risque d’agiter les débats de la loi LOM qui revient ce mardi à l’Assemblée.

POLITIQUE – Face à l’irruption des vélos électriques et de ce qu’il convient d’appeler les engins de déplacement personnels motorisés (EDPM), à savoir trottinettes électriques, monoroues, gyropodes et autres hoverboards, certains députés de la majorité se disent prêts à durcir le ton en poussant pour l’adoption de mesures de sécurité beaucoup plus drastiques.

Pour l’heure, le port d’une protection à la tête n’est obligatoire que pour les enfants de moins de 12 ans. Un projet de décret des ministères de l’Intérieur et des Transports consacré à la régulation des EDPM, censé entrer en vigueur en septembre, propose de réaffirmer cette limite d’âge, tout en prohibant le transport de passagers, l’usage d’écouteurs ou encore en bridant ces engins à 25km/h.

Mais plus d’une trentaine de députés LREM veulent profiter du retour ce mardi de la loi Mobilités (LOM) à l’Assemblée pour réclamer par voie d’amendement le port du casque obligatoire par les adultes pour tout usage d’un engin de déplacement, qu’il soit motorisé ou pas.

Gilet, casque, gants…

D’après un premier décompte, au moins cinq amendements issus des rangs de la majorité réclament un durcissement de la législation pour des motifs de sécurité. Celui porté par le député du Pas-de-Calais Benoît Potterie est sans conteste celui qui va le plus loin en la matière puisqu’il intègre les deux-roues non-motorisés.

Il prévoit que “tout conducteur ou passager d’un vélo, d’une trottinette, d’un gyropode, d’une motocyclette, d’un tricycle à moteur, d’un quadricycle à moteur, ou d’un cyclomoteur doit porter un gilet de haute visibilité et être coiffé d’un casque de type homologué” attaché, sous peine d’une amende.

L’amendement déposé par Pascale Boyer (Hautes-Alpes) ne vise à imposer que le casque mais pour tout engin “pour lesquels la force motrice humaine est nécessaire, avec ou sans assistance motorisée”. Un troisième défendu par Vincent Descoeur (Cantal) veut imposer la mise à disposition d’un casque conforme par les opérateurs de vélos et trottinettes en libre-service.

La députée des Hauts-de-Seine, Laurianne Rossi, a quant à elle déposé son propre amendement qui préconise le port du casque obligatoire uniquement pour les engins motorisés. Un autre prévoit le port de gants. Contrairement à certains de ses collègues, l’élue ne juge pas utile d’étendre cette règles aux deux-roues sans moteur. “Mais pour les opérateurs d’engins électriques en libre service, il s’agit d’une mesure de régulation autant que de sécurité”, défend-elle.

Au risque de faire péricliter des opérateurs déjà engagés dans une guerre sans merci pour trouver leur modèle économique? “Le casque obligatoire, techniquement, c’est faisable et ça ne tuera pas le ‘free floating’, nuance au HuffPost Laurianne Rossi. J’ai discuté avec tous les opérateurs, et il est d’ores et déjà possible de placer un boîtier avec un casque pliable sur leurs trottinettes”.

Pour les défenseurs de cette ligne sécuritaire, le port du casque obligatoire pour les engins motorisés en libre-service s’impose d’autant plus que les utilisateurs ne sont pas souvent expérimentés et plus exposés au risque de collision.

Les effets pervers du casque obligatoire

Ce durcissement trouve un écho favorable chez certains députés de Paris, où l’invasion des trottinettes électriques a non seulement provoqué des désagréments sur la chaussée mais aussi des accidents. Au point de devenir un enjeu électoral pour les municipales de 2020.

Le député Pacôme Rupin a déposé un cinquième amendement prévoyant le port du casque obligatoire uniquement pour les engins motorisés. Le candidat déclaré à la mairie de Paris Benjamin Griveaux soutient cette “position ferme” sur le dossier des trottinettes et appuiera le port du casque obligatoire, ainsi que la réduction de la vitesse maximale autorisée de 25 à 20 km/h pour ces engins.

Reste que le principe du casque obligatoire est loin de faire l’unanimité chez les défenseurs des mobilités douces, et tout particulièrement pour le vélo. “On peut se donner bonne conscience en rendant obligatoire le casque mais ce n’est pas la solution miracle”, esquive le député et candidat Cédric Villani.

Son ami, le député écologiste Matthieu Orphelin (ex-LREM), y est même carrément défavorable pour les vélos non motorisés, craignant que cela fasse reculer l’usage de la petite reine, tout particulièrement des vélos en libre-service. “Tout cela part d’une bonne intention mais c’est une fausse bonne idée, explique-t-il au HuffPost. Les Pays-Bas qui n’ont pas de casque obligatoire mais des infrastructures dédiées au vélo ont très peu de blessés”.

A l’inverse, certains pays qui ont décrété le port du casque obligatoire n’y ont pas vu que des atouts. En Australie, où la règle existe depuis trente ans, cette contrainte a eu pour effet de faire reculer la pratique du deux roues, ce qui pose d’autres problèmes de santé publique.

“Vouloir imposer le port obligatoire du casque à vélo est un contresens historique”, tonne ainsi l’adjoint aux Transports de Paris, Christophe Najdovski pour qui ce sont les aménagements continus et sécurisés qui assureront la sécurité des cyclistes.

La loi Mobilités doit justement prévoir une enveloppe de 350 millions d’euros sur 7 ans pour soutenir les grands projets des municipalités d’autoroutes à vélo ou de réaménagement de ronds-points dangereux. “C’est mieux que rien, avant cette enveloppe n’existait pas”, salue Matthieu Orphelin qui aurait tout de même voulu aller plus loin.

Malgré les objections, les défenseurs du casque obligatoire plaident pour que l’Etat agisse par voie réglementaire afin de relever le niveau de sécurité. “Mon amendement est avant tout un appel pour pousser le gouvernement à réguler les pratiques”, assure Laurianne Rossi. Verdict dans l’hémicycle.