« Certains savent à peine rouler »: les enfants sont-ils moins bons à vélo qu’avant?
Article original publié sur BFMTV.com
Coup de frein sur l’apprentissage du vélo. Des acteurs de terrain constatent des difficultés croissantes de certains enfants à bicyclette. « Il manque une culture du vélo pour toute une génération », estime Isabelle Gautheron, directrice technique nationale de la Fédération française de cyclotourisme, interrogée par BFMTV.com.
Il y a une « carence d’apprentissage », abonde Jean-Charles Romagny, conseiller technique national en charge des politiques éducatives à la Fédération française de cyclisme.
« Pour la génération actuelle d’enfants, l’apprentissage du vélo ne se réalise plus forcément au sein de la cellule familiale comme cela a pu être le cas pour les générations précédentes », assure-t-il à BFMTV.com.
Un programme pour les 6-11 ans
Depuis 2018, le programme « Savoir rouler à vélo », piloté par les ministères des Sports et de l’Éducation nationale, encourage l’apprentissage du vélo chez les enfants âgés de 6 à 11 ans. Objectif: que leur pratique du deux-roues soit autonome et sécurisée. Un programme qui se tient en milieu scolaire pour les écoles volontaires mais aussi en milieu périscolaire ou extrascolaire via les associations sportives ou les centres de loisirs.
Concrètement, il s’agit d’un cycle d’apprentissage de 10 heures minimum, avec une attestation délivrée à la fin, comme le rappelle l’Éducation nationale. Dont « savoir pédaler » pour maîtriser les fondamentaux (pédaler, tourner, freiner), « savoir circuler » en milieu sécurisé avec des notions du code de la route et « savoir rouler à vélo » en situation réelle.
Début octobre 2022, quelque 184.125 attestations avaient été délivrées en France métropolitaine et dans les outre-mer, indique la Sécurité routière à BFMTV.com. Si le programme a été « freiné » dans sa mise en place par la crise sanitaire, « à terme ce sera plus de 750.000 attestations par an qui seront délivrées à toute une classe d’âge », précise-t-on encore.
L’ambition, c’est aussi et surtout de donner les bons réflexes à vélo et ce dès le plus jeune âge – le programme est inscrit dans le Plan vélo du gouvernementqui sera doté de 250 millions d’euros en 2023. Car durant le premier semestre 2022, le nombre de cyclistes tués sur les routes a bondi, avec une augmentation de près de 30%par rapport à 2019.
Des enfants à vélo lors d’un événement organisé à Paris à l’hôtel de Matignon, la résidence officielle du Premier ministre, pour célébrer les quatre ans du plan vélo en septembre 2022 (photo d’illustration) – Christophe Archambault/AFP
Des difficultés pour les enfants des zones urbaines
S’il n’existe pas de données nationales, les acteurs impliqués dans le programme, comme la Fédération française de cyclotourisme, constate des écarts notables dans la pratique et la maîtrise du vélo selon l’origine des enfants.
« On a pu constater que les enfants qui vivent au cœur des villes savent moins bien faire du vélo que les enfants résidant dans des zones péri-urbaines ou rurales », observe-t-elle pour BFMTV.com.
Ces derniers sont ainsi « plus habiles », affirme Isabelle Gautheron. Ce qu’elle explique aisément: les zones rurales offrent plus d’espace pour la pratique du vélo et les villes ont jusqu’à présent davantage été pensées pour les transports en commun – bien que les pistes cyclables se soient récemment développées. Le Grand Paris prévoit notamment de créer 200 km de pistes cyclables dans les banlieues.
« En ville, il y a aussi des difficultés pour garer et stocker le vélo avec les nombreux problèmes de vol. Et même s’il y a des pistes cyclables, les parents estiment que c’est trop dangereux pour les enfants. »
Cette représentante de la Fédération française de cyclotourisme remarque également que les enfants issus de quartiers populaires ou défavorisés ont davantage de difficultés. « Ils n’ont pas les bons réflexes, certains savent à peine faire du vélo », regrette-t-elle.
D’ailleurs, Isabelle Gautheron a remarqué que ces enfants possèdent moins souvent leur propre vélo, équipement qui représente un coût pour les familles. Si le marché du vélo est en hausse, soit +4% en volume en 2021,celui du vélo pour enfant reste stable, selon l’Observatoire du cycle. Or, insiste-t-elle, son apprentissage est autant une question « de santé publique que de sécurité routière. »